Il y a des institutions qui, dans un passé encore récent, imposaient le respect ; c’était le cas de l’Armée. Mais les choses changent, et le regard posé sur elles également. Qu’est-ce qui peut encore imposer le respect dans une institution qui sert des intérêts qui ne sont plus ceux de la France ?
Si l’on demande aux militaires de ne pas penser, on peut leur faire confiance. De toute manière cela n’est pas leur rôle dans le cadre constitutionnel qui est le nôtre actuellement. Cela serait différent, par exemple, dans un pays où l’Armée aurait une conscience politique, où elle serait gardienne des intérêts supérieurs de la Nation et/ou de la Constitution.
Il y a à mon sens trois cas de figures que l’on rencontre dans cette société militaire française contemporaine ; dans le sens que l’on peut donner à son devoir d'état, l’on peut rencontrer les mêmes figures dans des institutions civiles. Ainsi, si certains militaires sont conscients de ce que le pouvoir leur fait faire « au nom du peuple français », ils accomplissent malgré tout ce qu’ils pensent être leur « devoir », les « mâchoires serrées », certes, car ils n’ont pas d’autres alternatives professionnelles ; d’aucuns le font en pleine conscience et même avec zèle, agissant en suppôts-dévots de l’idéologie en vogue et au pouvoir, en espérant - et parfois en en tirant effectivement - un bénéfice financier. Il y a aussi une masse informe de militaires « bœufs », type parfait de zombies sans lumières qui va où on lui dit de faire, sans se poser de questions. Faut-il blâmer telle ou telle catégorie ? faut-il déplorer le petit nombre de telle autre ?
Il faut peut-être regarder tout cela avec recul, détachement, et se dire simplement qu’il ne fait pas bon d’être soldat aujourd’hui, que ce métier - entendons derrière ce mot : vocation, traditions, honneur, fidélité, servir, etc. - ne représente plus rien de ce qui fut. Que mourir sous l’uniforme en 2011 n’est pas vraiment glorieux compte tenu de l’idéologie qui commande et envoie nos armées dans tel ou tel pays pour servir les intérêts de quelques cliques de l’hyper-classe mondialisée.
Les États-Unis en un sens ont compris ce qu’il fallait faire pour ne plus être hypocrite - assez paradoxal pour des Protestants évangélistes d’ailleurs - ceci en substituant peu à peu à l’armée nationale, des armées privées. Celles-ci furent à l’œuvre en Irak, en Afghanistan ; elles sont même aujourd’hui déjà en nombre égales dans les théâtres d’opérations, voire en passe d’être supérieures en nombres.
Car les armées aujourd’hui, dans ce système idéologique mondialiste, ne sont pas autres choses en définitive que des mercenaires. Et bien sûr, pas des mercenaires « à la papa », du type Denard, Faulques, Schramme, Tony de Saint-Paul ou Siegfried Muller. Les mercenaires membres des armés privées actuelles ne sont que des tueurs patentés, sans foi ni loi, sans honneur ni fidélité, si ce n’est aux rétributions sonnantes et trébuchantes. Depuis les années 90’s du XXème siècle, en effet, le mercenariat de type « ancien » n’est plus. On a vu cela avec le dernier coup de Denard aux Comores en 1995 (quand il renversa Djohar) et avec la montée en puissance d’Executive Outcome en Afrique du Sud. Nous sommes passés dans un autre monde…
Ainsi, dans son « Morte D'Arthur », paru dans Poems en 1845, le poète Alfred Tennyson ne disait-il pas (Cf. vers 236-238) :
“And I, the last, go forth companionless,
And the days darken round me, and the years,
Among new men, strange faces, other minds” (2).
Notes :
(1) C'est le titre éponyme d’un ouvrage du CNE Lucien Souchon, paru anonymement, chez Fayard, en 1929.
(2) "Et moi, le dernier, je poursuis ma route sans compagnon, / Et les jours s'assombrissent autour de moi, comme les années, / Au milieu d'hommes nouveaux, de visages étranges, d'esprits différents." (traduction pers.)
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